Eli Anderson

* JE REVE D'ECRIRE 2 * - un p'tit plan ?

26/04/2019

 

Je vous le dis tout de suite, les amis : vous allez trouver autant d’écrivains dans un camp (« Un plan ou rien ») que dans l’autre (« moi, un plan ? Jamais ! »). Et comme on aime bien faire compliqué quand on écrit, certains sont même dans un troisième camp, avec des demi-plans, des bouts de plan, des simili-plans, des ébauches de plan, des plans du genre « ouaaaaaais, c’est un plan, mais pas vraiment en même temps, tu vois ce que je veux dire ? » (bon, j’ai répondu « oui, je vois tout à fait », mais j’ai menti).

 

Pour ma part, je fais partie du premier camp : je suis fondamentalement, définitivement, résolument un « plan-addict », et j’assume, je n’ai prévu aucune désintox. Et je vais vous expliquer pourquoi et comment. Le pourquoi, ce n’est pas pour vous convaincre, loin de là. Mais si vous êtes adepte du free-style, en mode « j’y vais tête baissée et on verra bien où mes personnages me mènent », lisez quand même la suite, vous verrez qu’il y a peut-être des choses à prendre ici où là dans le camp des « plan-addict ». Et qui sait, peut-être que vous goûterez à cette drogue douce, vous aussi, et que vous en serez accro ?


POURQUOI un plan ?

 

J’y vois plusieurs raisons :


Avant tout, le plan me donne une vision d’ensemble hyper efficace pour la cohérence du récit : sur quelques pages gavées de post-it (cf. COMMENT), j’ai tout le roman déroulé sous mes yeux, et ça, c’est vraiment précieux – à fortiori quand on écrit un thriller, un livre à suspense, un livre à enquête etc. où l’enchaînement des événements, capital, est millimétré.

Le plan me permet aussi de m’assurer que j’ai bien suivi les fils rouges qui guident mon récit. Avec un plan, je me rends également compte en un coup d’œil si j’ai laissé un personnage secondaire au bord de la route, comme ça, pouf, l’air de rien (si ça vous arrive avec un personnage principal, là, y’a un problème plus sérieux dans le roman, j’avoue)… Je vous dis ça parce que quand votre éditeur lit votre manuscrit et qu’il vous demande : « au fait, Liam, qu’est-ce qui lui est arrivé ? Il a disparu après le chapitre 37… » et vous, vous vous sentez très, très coupable vis-à-vis du malheureux Liam - qui, quitte à disparaître, aurait quand même bien apprécié de le faire dignement, même une mort subite, hein, mais une mort, quoi, une vraie - et très très bête face à votre éditeur qui vous prend un chouia pour un charlot. Vous voyez le truc gênant comme pas possible, ou pas ?

Le plan est aussi très utile quand il s’agit de faire un repérage. Exemple : vous cherchez à quel moment votre héroïne a quitté le bâtiment de la police, alors que deux chapitres plus tard, elle s’y trouve encore…

Le plan est aussi un très bon outil pour évaluer l’équilibre du texte : mettez un point rouge sur les chapitres « action », un point vert sur les chapitres « émotions », un point bleu sur les chapitres « analyse – enquête » etc. et vous verrez tout de suite, sur les quelques pages du plan, si l’alternance des couleurs est heureuse, équilibrée, et si vous ne vous retrouvez pas avec cinq chapitres d’affilée avec vos héros en train de se bécoter et se susurrer des mots doux alors que vous êtes dans un thriller, au climax de l’action, entre deux courses poursuites et une éventration (elle est optionnelle, mais elle peut se produire). Votre lecteur vous en sera reconnaissant jusqu’à son dernier souffle (s’il atteint le bout du thriller sans tourner de l’œil).

D’un point de vue plus pratique et même technique, enfin, l’avantage crucial que je trouve à faire un plan béton, en sachant d’emblée tout ce que j’écrirai, chapitre après chapitre, et jusqu’à la fin, c’est celui-ci : une fois le plan fait, quand je passe à la phase d’écriture, je peux m’y consacrer pleinement sans faire l’effort simultané de réfléchir à la construction et la structure du roman, puisque tout est déjà fait !

Alors certes, je suis un mec, et un mec, tout le monde le sait (même les mecs, et pourtant, on sait être de très mauvaise foi, mais là, c’est pas possible de nier, hein), ça n’est pas équipé pour faire deux choses en même temps. Comme dit mon père avec un sens aigu de la philosophie : « c’est comme les couteaux suisses : ils font tout, mais il font tout mal » (pardon, les amis suisses qui liront ce texte, mon père vous aime quand même). Mais croyez-moi, même si vous êtes une fille, donc une superwoman, c’est quand même hyper confortable d’avoir établi et consolidé toute la trame et la structure de votre roman avant de commencer à l’écrire. Comme je n’ai pas le niveau philosophique de mon père, je me contenterai de cette formidable métaphore : bâtissez d’abord la charpente, et ce sera un jeu d’enfant de poser les tuiles (je ferai mieux la prochaine fois).


COMMENT faire un plan ?

 

Alors là, autant vous dire qu’il y a autant de façons de faire que d’écrivains. Ça va du plus light au plus obsessionnel.

Je vous laisse le soin de me mettre dans la bonne case, quand vous aurez lu la suite…

Pour ma part, j’ai créé une grille sur Word, avec deux colonnes et dix cases dans chaque colonne (j’en imprime autant qu’il en faut pour couvrir tout mon roman).

La colonne de gauche, c’est celle des titres de chapitres (ou du nom que je leur donne et qui désigne l’essentiel du chapitre) ; celle de gauche, c’est celle des MAD : les messages à délivrer. (vous commencez à situer un peu le gars ?)

Initialement, j’écrivais donc dans chaque case, au feutre noir pour la colonne de gauche, au crayon HB pour la colonne de droite (histoire de pouvoir modifier les MAD pour chaque chapitre). Le problème, c’est que :

1)    Je voulais aussi pouvoir changer l’ordre des chapitres (c’est un des intérêts majeurs du plan, vous l’aurez compris : une vision globale qui vous permet de vous dire : « ah ben non, ce chapitre, ce serait mieux ici plutôt que là, pour l’équilibre du récit et le déroulement de l’action »

2)    je ne supportais pas (et ça, ce fut l’argument massue pour moi, mais je vous laisse libre de choisir vos priorités, surtout si vous êtes plus sain d’esprit que moi) je ne supportais pas, donc, que mon doigt laisse des trainées de crayons HB sur la feuille, j’en étais malade - d’autant que lorsque je voulais les gommer, je faisais des plis sur la feuille, ce qui me rendait encore plus malade. (Oui, ça va jusque là. Je sais : c’est très grave, à ce stade).

J’ai donc modifié les choses : au lieu d’écrire directement dans les cases de mes grilles, j’écris sur des post-its, que je peux ensuite déplacer autant que je le souhaite pendant la conception de mon plan. Et ça, c’est vraiment, vraiment le pied.

 

Bien sûr, pour éviter que tout se salisse ou se déplace ou se décolle, je glisse les feuilles de mon plan dans des pochettes plastifiées que je scelle, et si quelqu’un y touche, il signe son arrêt de mort (en toute bienveillance). Et d’ailleurs, personne n’ose y toucher. (et par ailleurs, en relisant tout ceci, j’ai décidé de prendre rdv chez un psy, je pense que personne parmi vous ne s’y opposera farouchement).

 

LE TRUC HYPER UTILE : le « truc » que je vous conseille de garder dans un coin de votre jolie tête bien faite : chaque fois que vous pensez avoir entre les mains une version aboutie de votre plan, lisez-le à haute voix. Même seule/seul (c’est encore mieux si vous avez un auditeur gentiment malveillant en face de vous…). C’est un excellent test, parce qu’ « entendre » l’histoire de son propre roman vous fait prendre du recul, il y a un effet miroir très intéressant. Vous « entendrez » tout plein de petites incohérences, de scènes mal à propos, qui jurent à une place plutôt qu’une autre, etc. et globalement, si vous avez du mal à raconter votre roman en suivant le plan, si vous butez sur des éléments du récit, ou si, en vous écoutant vous ne vous sentez pas parfaitement bien avec le déroulé, c’est le signe que la version n’est pas aboutie.

Dans ce cas, posez, faites autre chose, laissez passer une journée (et pas moins), reprenez, et l’étincelle se fera !

 

Voilà, j’espère que ce post sur le plan vous aura plu, n’hésitez pas à partager, rameuter les copains qui aiment / qui voudraient écrire, à me laisser des commentaires, à partager votre point de vue : c’est un échange avant tout !

 

Et surtout, dites-moi : vous, vous êtes « plan-addict » ou « free-style » ?

 

 

 

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